Quel souvenir gardez-vous de la finale de Coupe de France 2006
entre le PSG et l’OM ?
On pourrait dire que, vulgairement, j’avais un peu le cul entre
deux chaises. J’avais été nommé mais je n’étais pas encore en
poste, et Pierre Blayau était donc bien le président de la finale.
J’étais très concerné, d’une part parce que je ne peux être que
concerné et à fond pour un PSG-OM où je redeviens supporter, et
puis parce que la victoire me permettait, un peu égoïstement, une
qualification en Coupe de l’UEFA la saison suivante. Et j’ai
évidemment beaucoup apprécié le but de Vikash (Dhorasoo,
ndlr), d’autant plus qu’il n’en mettait pas beaucoup.
Malheureusement, j’ai eu quelques problèmes avec lui après
(Dhorasoo a été licencié pour raisons disciplinaires quelques mois
plus tard, ndlr). Mais aujourd’hui, on s’entend bien.
Ce match fait-il partie de vos PSG-OM préférés ?
Déjà, les matches contre Marseille ne sont jamais des matches comme
les autres, ce sont des matches passionnants où on jouait presque
une saison sur un match. J’ai des souvenirs précis et dans les plus
prégnants il y a aussi celui où Ronaldinho fait un malheur au
Vélodrome (en 2003, ndlr). Je me demandais si je ne rêvais
pas, ce n’était pas possible… Et puis ce match de Coupe de France
avec Jérôme Alonzo dans les buts (8es de finale en 2002,
ndlr), où j’étais rentré comme un fou sur le terrain à la
fin ! Et quand Vahid Halilhodzic est arrivé, il voulait que je
fasse la causerie avant les matches face à l’OM. Il disait: «Ce
match-là, c’est à Cayzac !» J’ai ensuite fait toutes les
causeries de Paul Le Guen, parce qu’il le souhaitait. Il parlait,
et puis je concluais. Il fallait à chaque fois les motiver, trouver
un angle nouveau, être court, et ne pas parler technique parce que
ce n’est pas le rôle d’un président. Je ne le faisais pas aussi
bien que Pascal Dupraz, mais je jouais aussi sur cette corde-là. Il
y a des motivations simples sur lesquelles il a joué, très
brillamment d’ailleurs, avec une spontanéité incroyable. Moi, je
trouvais quelque chose qui pouvait les toucher. Et souvent, ce qui
les touchait le plus, c’était de leur dire qu’ils étaient bons.
Vous n’étiez donc pas un président interventionniste ?
Non, mais ça ne m’empêchait pas de donner mon point de vue.
Au début de mon mandat, les Yepes, Pauleta ou Rothen n’étaient pas
toujours très heureux. Je faisais un peu comme Fogiel aujourd’hui,
du divan… (sourire) Je me souviens notamment de Yepes, qui me
disait qu’il était très malheureux, qu’il ne dormait pas la nuit
parce qu’il n’était plus titulaire. Et qu’il ne jouerait plus si
c’était à droite ! C’est d’ailleurs la seule fois où je me suis
mêlé de technique, quand je lui ai dit quelque chose qu’on n’osait
pas lui dire mais que tout le monde pensait: «Je ne suis pas
entraîneur, mais tu joues beaucoup trop bas !»
« Une ambiance de guerre civile »
Votre règne a aussi été marqué par l’affaire de la banderole
anti-Ch’tis, alors que, deux ans plus tôt, celle saluant la
victoire parisienne face aux Marseillais («OM: Droit au bus») avait
plutôt été saluée…
Il y a en a eu, c’était du génie. «OM: Droit au bus», c’est génial.
Il fallait le trouver. Moi qui ai fait de la pub, c’est un slogan
que j’aurais aimé trouver. Et le week-end d’après la fameuse
banderole anti-Ch’tis, je crois que les Lillois en avaient sorti
une où il y avait écrit: «Les Parisiens ont parfois raison».
Mais la banderole contre les Ch’tis n’était pas drôle, ni très
appropriée. Il y en a aussi de très méchantes ailleurs. Après la
victoire en Coupe de la Ligue contre Lens, j’ai d’ailleurs été
heureux un quart d’heure. Je n’avais pas vu la banderole, personne
ne l’avait vue. Et le lendemain, j’ai fait tous les plateaux télé
pour m’excuser. Même si je n’y étais pour rien. Il y avait un côté
ridicule, avec le maire de Lens (Guy Delcourt, ndlr) qui
s’en est mêlé alors qu’il ne savait même pas ce qu’était le
football et qui demandait à ce qu’on retire des points au PSG…
Comment avez-vous vécu la naissance et l’évolution de la
rivalité Paris-Marseille ?
C’était incontestablement une création marketing, de Canal+ et
Bernard Tapie, et après c’est presque devenu naturel. On
avait un vrai concurrent, un adversaire, mais ça a vite dépassé les
limites pour devenir un ennemi. Et là, c’est devenu très dangereux.
Quand à l’école, tu demandais à ton enfant si son camarade était
sympa et qu’il te répondait: «Non, il est Marseillais»…. Je
leur disais de faire attention et de ne pas faire du racisme
anti-Marseillais. C’était folklorique. Mais quand il y a eu des
violences à Paris ou sur le Vieux-Port, on rigolait moins. J’ai
fait des déplacements à Marseille où on avait besoin de 15
cars de CRS pour aller de l’hôtel au stade, on se faisait lancer
des pierres et il ne fallait pas s’arrêter… Ou quand Luis
(Fernandez, ndlr) avait dû être protégé par le GIGN après sa
danse… C’était une ambiance de guerre civile qu’il y avait
également dans l’autre sens, comme quand Fiorèse ne pouvait pas
tirer de corner au Parc. Après, on a joué un rôle apaisant avec
Pape Diouf. On s’entendait bien et on a fait une interview ensemble
une semaine avant le match, dans la Provence et Le Parisien, pour
dire que cette rivalité était formidable, que ce n’était pas un
match comme les autres, et qu’il pouvait y avoir de la ferveur, des
cris et des tifos, mais pas de violence. Et ça avait été bien
perçu.
#Football Quand Alain Cayzac faisait les causeries de PSG-OM… https://t.co/zSLEEpKppj pic.twitter.com/PL4hY5svZF
— Europe1 Sports (@sports_fr) 20 mai 2016